Alors, clairement ce qui frappe,
c’est la patience des gens. On est quand même pas mal de doc sur place mais
quand il y a des sorties SMUR, ce qui supprime un médecin, un infirmier et un interne,
ça devient plus dur, mais personne ne se plaint ! Les locaux sont confortables et l'équipe soignante trop sympa.
Les pathologies sont diverses et
variées et même tropicales. Je citerai
juste : diarrhées glairo sanglantes, anémie sur carence essentiellement, fièvre
typhoïde, hépatites , troubles ioniques
(perte de potassium, souvent induite par des traitements traditionnels). En
effet, près de la moitié des patients ont vu un « fundi », avant de
venir à l’hôpital. Chez les enfants c’est un peu les mêmes pathologies avec en
plus les pneumopathies, les asthmatiques et les retards de croissance, sans
oublier les viols. Il y a beaucoup de traumatologie, avec des fractures en tout
genre. C’est souvent des accidents de la route, des chutes de manguiers (c’est la saison), ou des agressions. Et c’est
la même en préhospitalier : on peut aller directement sur les lieux ou au
domicile (souvent des banga : maisons faites en tôle ou en torchis) ou le
reste du temps on va en renfort aux dispensaires. Il y en a 4 gros, répartis au
4 coins de grande terre et un sur petite terre.
J’ai fait mon premier vol hélico pour
aller chercher au nord un petit de 3 mois en détresse respiratoire. Et bah c’est
trop cool, on voit les différences de fond dans le lagon, c’est des nuances de
bleus turquoises, de quoi oublier l’austérité de la vie pour certains.
Et puis aux urgences, on voit
souvent les kwassa-kwassa. Ce sont de petites pirogues qui emmènent les
comoriens sur Mayotte. C’est un business
mafieux, plus ou moins dégueulasse ; il faut payer au minimum 500 euros
pour un aller à plusieurs sur le bateau (et t’es pas sûr d’arriver vivant).
Je
parlais de patience, un ben là c’est tout simplement dingue : les gens
arrivent avec des pathologies graves souvent trop tard. Sur des abcès du bras,
quand tu viens 3 mois après le début, bah souvent on t’enlève le bras…. Une
étude est en cours dans le service pour savoir si l’hôpital ne gagnerait pas à
mettre des toubibs là-bas pour premièrement réaliser les transferts sanitaires
dans de bonnes conditions et secundo de les réaliser dans les bons délais.
Le dernier truc, car je vous
passerais les difficultés à avoir des avis médicaux spécialisés, des scanners,…,
c’est l’AGD. Affection Grave et Durable, c’est le nom qu’on donne pour que les
patients ne bénéficiant pas de la sécu, soient pris en charge par l’hosto. Si t’as
pas la sécu, tu payes 30 euros la consultation aux urgences et 10 euros pour le
traitement. Et ceux qui n’ont pas la sécu, c’est souvent les clandestins et eux
ils n’ont pas une tune. Alors le truc marrant c’est que la décision AGD, ne
dépend que du médecin urgentiste qui prend le patient en charge. N’étant pas un
amoureux de l’administratif mais plutôt d’Hippocrate, moi je leur signe tous le
droit aux soins gratuits et on est plusieurs à avoir cette philosophie. Je
calmerais tout de suite les ayatollahs de l’économie sanitaire, et ceux qui voient
leur trou (celui de la sécurité sociale) grossir à vue d’œil, en vous
expliquant qu’avant de venir faire chier un toubib qui soigne un malade à
mayotte, on devrait revoir les débordements métropolitains.
Marie est très demandeuse le soir,
pour que je narre mes journées de boulots. On sent qu’elle aussi à envie de
rencontrer ces gens, et d’adapter la médecine des bouquins à la vie mahoraise.
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